Depuis près d’une semaine, les combats ont repris au Nord-Kivu, dans l’est du Congo. Les rebelles du M23 (rébellion à dominante tutsi vaincue en 2013 et réapparue fin 2021), qui tiennent la ville de Bunagana depuis plus de quatre mois, affrontent les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) sur plusieurs fronts dans cette province proche des frontières avec le Rwanda et l’Ouganda.

« Chaque camp se renvoie la responsabilité de la reprise des combats après un cessez-le-feu qui ne méritait pas son nom », a déclaré un diplomate occidental à Kinshasa, qui a admis « ne pas pouvoir dire quel clan a déclenché cette nouvelle offensive ».

Certains communiqués des troupes congolaises accusaient à nouveau le Rwanda d’être à l’origine de cette nouvelle flambée de violence, qui aurait fait « au moins quatre morts et 40 blessés », selon l’un de leurs communiqués.

D’autres sources militaires ont également souligné la complicité de l’autre pays voisin, l’Ouganda, qui aurait déployé deux bataillons pour soutenir les rebelles du M23. Certains des chefs de ce mouvement rebelle avaient trouvé refuge dans ce pays après la défaite de 2013.

Une version qui « n’a pas été démentie par les responsables de Kampala », nous explique une source de l’armée congolaise. « Ce n’est pas notre rôle de réagir aux rumeurs. Nous n’avons aucun intérêt à nous immiscer dans ce conflit », nous explique une source ougandaise. « Nous avons entendu dire que deux bataillons ougandais étaient impliqués dans les combats, c’est une pure invention. De plus, nous n’avons reçu aucune notification officielle de la RDC. Ce sont des rumeurs qui circulent sur les réseaux sociaux, peut-être entretenues par certains militaires congolais pour justifier le fait qu’ils sont en difficulté contre les rebelles ».

Prise de Ntamugenga

Les rebelles qui ont pris le contrôle de Ntamugenga dans la nuit de samedi à dimanche, se rapprochant ainsi de la route nationale 2 qui dessert Goma, la capitale provinciale.

« Le front bouge peu », explique une source militaire congolaise. « Alors que les rebelles ont gagné du terrain au sud et contrôlent désormais Ntamugenga, ils ont été repoussés sur les fronts de l’ouest et du nord ».

« C’est très compliqué de lire exactement ce qui se passe. Les communications sont multiples, les canaux officiels pas toujours crédibles, ce qui laisse beaucoup de place aux rumeurs et autres fake news qui se propagent sur les réseaux sociaux », reprend le diplomate occidental en poste à Kinshasa.

L’avancée des rebelles en direction de la route nationale 2 inquiète néanmoins. Personne n’a oublié qu’en 2013, le même mouvement avait brièvement occupé Goma.

Quelle issue au conflit ?

Aujourd’hui, beaucoup pensent que l’avancée des rebelles est avant tout un message pour forcer le pouvoir en place à Kinshasa à dialoguer. « Mais la rhétorique du pouvoir congolais interdit tout dialogue avec le M23. Pour Kinshasa, ce sont des terroristes et personne ne peut imaginer s’asseoir à une table avec eux. Il ne reste donc que la solution militaire, mais les FARDC ne semblent pas en mesure de vaincre ces rebelles, du moins pour le moment », constate une source proche du gouvernement ougandais, faisant référence aux nouvelles nominations à la tête de l’armée orchestrées par le président Tshisekedi. « Ces nominations ont peut-être remis en cause certaines rentes et affaibli certaines mafias dans cette province. Cela pourrait peut-être expliquer la reprise des combats ».

Une piste qui tente d’expliquer cette nouvelle flambée de violence, mais qui n’offre aucun début de solution sur le terrain.

Félix Tshisekedi avait annoncé dans une interview en marge de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre dernier que les troupes kényanes, annoncées dans le cadre du déploiement de forces régionales pour mettre fin à ce conflit et à tous les conflits à l’Est, entreraient rapidement en action en pénétrant en RDC par le poste frontière de Bunagana. Un scénario qui tarde toujours à se concrétiser. « Nous ne pouvons pas espérer mettre fin à ce conflit de cette manière. Nous ne pouvons pas sous-traiter la sécurité de notre pays. La solution réside dans une victoire de l’armée congolaise contre le M23 et les autres rebelles. Pour y parvenir, nous devons investir sérieusement dans notre armée et son armement et mettre fin au détournement des fonds annoncés pour ces hommes qui se battent sur le terrain », conclut un ex-militaire congolais, exaspéré par « les éternelles promesses du pouvoir ».